Rue du Champ Bacon, la Ressourcerie d’IMAJ emploie des salariés, dont une bonne moitié de jeunes en chantier d’insertion. Cet environnement de travail adapté leur permet de faire une entrée progressive dans le monde de l’entreprise.
« Les gens déposent des vêtements ici. Moi je fais le tri entre ce qui est bon et ce qui va au recyclage », explique Fatouma, alors qu’elle inspecte des paires de chaussures. Dans la salle de tri où elle travaille, il y a des étagères sur lesquelles les vêtements sont classés par âge et genre. Une autre avec les accessoires ( sacs, ceinture ), et même un petit miroir. Une encadrante passe la voir pour savoir si tout se passe bien. Plus loin, un espace de vente où sont exposés toutes sortes d’objets « vintage », parfois détournés de leur première fonction. C’est une journée comme les autres à la Ressourcerie d’IMAJ. Situé avenue du Champ Bacon, ce lieu où l’on récupère, customise et revend des objets donnés est aussi un chantier d’insertion. Reportage.
Un chantier d’insertion dans une ressourcerie
« J’ai fait un stage de trois semaines dans un Franprix, à Saint-Denis. J’aurais bien aimé continuer, mais ils ne m’ont pas rappelée », raconte Fatouma pendant sa pause. À 22 ans, cette jeune mère de famille occupe depuis 5 mois son premier emploi, et pas n’importe lequel : il s’agit d’un 26 h par semaine en contrat d’insertion. Fatouma y apprend des savoir-faire
utiles pour la suite : « Dans mon stage, j’ai été une heure derrière la caisse. À la Ressourcerie, j’ai appris à scanner des livres ». Au bout de quelques semaines, ou de quelques mois, Fatouma sera prête à postuler dans une entreprise. Elle aimerait être aide-soignante ou caissière, mais elle a encore du temps pour y réfléchir.
« Je laisse partir les gens quand j’estime qu’ils sont suffisamment armés pour trouver du travail, sachant que l’on continue l’accompagnement pendant 6 mois à la fin du contrat. Généralement, dans les deux mois ils sont en poste. » expose Catherine Delaforge, adjointe de direction et cheffe de service. Les Contrats en Insertion sont adaptés à des personnes éloignées de l’emploi, qui auraient besoin de mettre un premier pied dans une activité salariée adaptée. Le quota d’heures par semaine est plus bas que la moyenne et peut être progressivement augmenté. « 35 h, ça fait trop lourd au début. Avec 26 h par semaine, ça laisse du temps pour faire des démarches », complète Pamela Mouchiroud en charge de la sensibilisation et du partenariat.
Les deux sens du mot « réemployer »
Parallèlement à leur activité, les salariés sont accompagnés socialement pour lever certains freins à l’emploi : trouver un logement, améliorer son niveau de français, ou tout simplement reprendre un rythme en se levant tous les matins. « Je dis souvent que notre mission est de redorer le blason de l’image travail et montrer que cela n’est pas forcément synonyme de contrainte. Tous les emplois ne se font pas dans la violence et la douleur », explique Catherine Delaforge. Dans la boutique ou dans les salles de tri, les encadrantes et encadrants veillent à ce que règne une bonne ambiance de travail.
Dans la salle de dépôt, un jour d’ouverture, des jeunes hommes se passent la balle en attendant les clients. « Ils sont jeunes, il ne faut pas l’oublier », lance Nassima Khelifa. Un matelas à transporter et, l’instant d’après, ils s’affairent. Pas besoin d’insister ou de s’énerver, le cadre est là, et il est intégré par tous. « On essaye de leur apprendre l’organisation, avant et après le travail. Le savoir-être ça s’apprend, et chez certains, je peux vous dire que les codes ne sont pas forcément intégrés », raconte cette encadrante qui a commencé ici comme bénéficiaire. « Quand je suis arrivée ici, ils m’ont accompagnée, aidée, rassurée. Je veux que les gens bossent, s’occupent. Tu n’avances à rien si tu restes chez toi à ne rien faire. Ça pèse sur le moral ! »
La force des équipes intergénérationnelles
« Ici j’ai rencontré un autre monde », raconte Monsieur Bo, 30 ans. Assis devant un ordinateur dans la salle de dépôt, il explique qu’il attend de faire une formation dans un domaine qui lui plaît : un BTS en Génie Civil. Nassima décrit un jeune-homme refermé sur lui-même, qui s’est progressivement redressé. Comme beaucoup de personnes ici, il y a été amené par Pôle Emploi qui l’a déclaré éligible au chantier d’insertion. D’autres candidats sont conduits là par la Mission Locale ou l’École de la deuxième chance. L’insertion des jeunes est inscrite dans l’acronyme d’IMAJ ( Initiatives Multiples d’Actions auprès des Jeunes ).
Parallèlement à la Ressourcerie, l’auto-école, deux autres ateliers d’insertion et une équipe d’éducateurs spécialisés en prévention spécialisée. Les jeunes déscolarisés très tôt, peu habitués aux codes du travail, c’est à l’origine le public cible d’IMAJ et de la Ressourcerie.