Jeudi 2 mars 2023, des Beauvillséois de toute la ville sont venus participer à un débat sur le protoxyde d’azote. Ces échanges nourris par des questions pertinentes et des témoignages poignants ont mis en lumière cette nouvelle drogue.
Le ‘’proto’’ ou le ‘’gaz hilarant’’ fait partie des produits actuels appréciés notamment par les jeunes générations pour se « défoncer ». Et c’est loin d’être une bonne blague. Une popularité qui inquiète des familles de Villiers, dont certaines ont pu constater les effets très néfastes de cette substance sur leurs enfants.
Le jeudi 2 mars, au centre socioculturel Camille Claudel, un public d’une cinquantaine de personnes, dont beaucoup de jeunes, est venu s’informer et échanger autour du protoxyde d’azote. Une séance de prévention organisée par une maman d’élève et une animatrice du centre, et orchestrée par Almamy Kanoute.
La prévention sans culpabilisation d’Almamy Kanoute
« Combien d’entre-vous ont déjà essayé de consommer du proto? Allez, levez la main! Ceux qui sourient, vous vous êtes déjà trahis » plaisante Almamy Kanoute. Connu pour avoir joué dans Les Misérables de Ladj Ly, il est venu avec sa casquette de consultant en cohésion sociale, et son bagou d’éducateur spécialisé. Après avoir projeté deux reportages saisissants sur deux femmes à moitié paralysées par le gaz, Almamy a proposé une explication très pédagogique basée sur les dernières actualités.
Un cours magistral très vivant, car agrémenté de mises en garde personnelles et bien amenées. « Moi aussi j’ai été jeune, et j’ai fait beaucoup la fête. On se dit ‘’juste une fois, c’est pas grave’’. Sauf que dès la première fois, ça peut faire de gros dégâts ». Le ton est ferme, mais sans culpabilisation. Et c’est en partie ce pourquoi Fatoumata Diallo, maman d’élève de Villiers adhérente à la FCPE a voulu faire appel à lui. « C’est la personne la plus à même de pouvoir sensibiliser les jeunes », argumente-t-elle. Cette mère de famille qui est également aide soignante à l’hôpital, est très bien placée pour voir les dégâts du protoxyde d’azote sur la santé des jeunes. Ce qui l’a motivée à prendre l’initiative de cette séance de prévention, aux côtés de Yasmina, animatrice à Camille Claudel, c’est de voir les jeunes consommer juste en bas de chez elle : « Ils font des ballons (fait d’inhaler le gaz préalablement vidé dans un ballon) juste là, derrière la maison de quartier. On y retrouve des cartouches ».
De nouveaux (jeunes) ambassadeurs à Villiers
« J’espère que le message est bien passé. J’espère que je peux faire de vous des ambassadeurs à Villiers ». L’invitation d’Almamy Kanoute s’adresse directement aux jeunes qui ont répondu présents ce jour-là. Le service jeunesse a mené un travail de sensibilisation en amont qui leur a donné envie de pousser la porte de Camille Claudel. « Il y a eu un débat aujourd’hui juste avant, on en avait parlé entre nous. J’ai jamais touché à ce gaz, mais je savais pas que ça avait autant de conséquences. Ça m’a marqué l’histoire de la jeune femme qui s’est retrouvée en fauteuil roulant à cause de ça », explique Nina, bientôt 16 ans,scolarisée à Sarcelles et habitante du quartier. Ethan, un collégien d'une ville voisine a suivi son cousin : « c’est lui qui m’en a parlé. Moi je savais même pas que ça existait ce gaz. J’étais choqué d’apprendre qu’ils en fabriquent dans des usines! ».
Le témoignage poignant d’une mère de famille
‘’ Choqués’’ ou ‘’touchés’’, ils semblent tous l’avoir été par les témoignages vidéos projetés, et aussi par celui de Lysianne, une mère de famille qui a fait part de l’histoire de son fils, gravement touché par les effets du protoxyde d’azote. « Il est revenu d’un weekend complètement faible. Si j’étais pas intervenue, deux heures plus tard, mon fils de dix-sept ans serait mort à l’heure qui est ». La peur et la colère sont encore intactes trois ans plus tard chez Lysianne qui pense que la prévention a été insuffisante ces dernières années : « On fait pas des enfants pour les voir comme ça. Vous les jeunes, vous ne comprenez pas ce fléau. Je vois encore des copains de mon fils faire des ballons, alors qu'ils ont vu mon fils en fauteuil roulant.»
Le début d’une campagne de prévention à plus grande échelle
En réponse à cette colère venue du cœur, Vincent Grammont, chargé de mission sur la prévention de la délinquance à la Ville, s’est permis de faire la lumière sur des actions de préventions qui ont été menées, notamment par la Police Municipale auprès des commerçants soumis à une règlementation stricte depuis juin 2021. Il évoque également un flyer distribué dans les collèges, les lycées, et d'une intervention de France Addiction. Le fléau du protoxyde d’azote est très récent et donne du fil à retordre aux autorités et institutions de toutes sortes. Comment alerter sur des produits initialement anodins? Pourquoi avoir peur avoir peur du gaz à crème Chantilly et des ballons de baudruche?
Les enfants présents dans l'assemblés ont aussi laissé entendre leur point de vue rafraichissant. « Pourquoi c’est vendu dans des supermarchés si c’est dangereux? Est-ce qu’on peut en manger avec la crème chantilly? Pourquoi on arrive plus à s’arrêter d’en prendre? ». Des questions toutes simples qui ont fait appel à l’esprit de synthèse, (parfois avec des arguments scientifiques!) des intervenants venus lever le voile de mystère et de fantasme sur un gaz pas marrant du tout.
